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La Dubarry eut certainement d’autres nuits, meilleures que celle-ci, mais, telle qu'on nous la raconta, son aventure vespérale est fort plaisante.
Elle n’est pas encore reine de France de la main gauche — la main sinistre — et ne se doute point qu’elle prononcera un jour des paroles définitives que les cafetiers reprendront à l'adresse des « pompiers » distraits.
Son protecteur, le duc d'Aiguillon, se doute qu’il est trompé par un garçon coiffeur, le nommé Léonard, lequel, durant le règne suivant, aura l’honneur d’édifier des corvettes sur le chef auguste de l’Autrichienne. Le galant « capillariste » reçut même, des mains de la courtisane et en récompense de ses offices... spéciaux, une perle de valeur, cadeau du noble duc. Celui-ci, renseigné par Julie, femme de chambre de la Dubarry et, par surcroît, maîtresse de Léonard, veut se venger. Il poursuit les coupables jusqu’en un couvent
dont la prieure, Mère Marie des Séraphins, est une ancienne ballerine de l’Opéra. Léonard, qui put s’échapper une première fois
en revêtant le costume d’un bon abbé ancien mousquetaire... gris, parvient encore à se rire des exempts, grâce à ta bonne Mère en question...
Au cours de cette fuite éperdue, nous avons la joie d’assister aux ébats chorégraphiques de nonnettes qui ne sont pas plus de Dijon que des Capucines... Tout s’arrange au troisième acte après quelques imbroglios classiques. Le duc d’Aiguillon récupère sa perle qu’une étrange coquille avait gardée jalousement — mais Diderot nous a déjà conte cette histoire...
[Extrait de "Comoedia", 18 avril 1922]