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Oui, mes personnages sont historiques, et ma plèce l'est presque ! Un soir, au Théâtre de la Madeleine, il y a de cela deux ans, j'ai vu entrer dans ma loge un homme, un étranger, que je n'avais jamais rencontré de ma vie. C'était M. Sam Barlow. Il me dit : "Monsieur, avez-vous lu le Figaro de ce matin ?" - No, Monsieur. - Le voici. Liez-le. Il me semble que vous y découvrirez un ravissant sujet de pièce. Et je lus l'article suivant :
UNE CURIEUSE AVENTURE DE FLORESTAN 1er - PRINCE DE MONACO (1841-1856) Au moment où l'on a rappelé la généalogie de l'antique famille des Grimaldi, à laquelle appartiennent les princes de Monaco, il nous a paru curieux de raconter ici une aventure de jeunesse peu connue, toute à l'éloge, du reste, de celui qui en fut le héros, du prince Florestan 1er, le grand-père du prince Albert et l'arrière grand père du prince Louis. Le jour où l'on avait conduit à sa dernière demeure le modeste comédien qui avait résumé en lui le type le plus complet des comédiens nomades et burlesques, les journaux annoncèrent que cet humble corbillard avait été suivi par trois reines du théâtre, Mlle George, Mlle Dorval et Mme Albert et... un prince régnant. Quel pouvait avoir été ce prince, et par suite de quelles circonstances avait-il été amené à venir saluer la dépouille de Rosambeau, car il s'agissait du fameux Minet de Rosambeau, une des dernières figures les plus originales que l'on ait vues depuis le Roman comique. Rosambeau, dont la vie n'avait été qu'un long tissu d'aventures dans lesquelles l'art, le talent, la misère, l'insouciance, le rire et les pleurs s'étaient tout à la fois heurtés. Rosambeau, c'est à dire Hoffmann, Scarron, Gil Blas, Larisolle et Larancune, le sublime cotoyant le ridicule, la résignation joyeuse, l'esprit toujours présent, la tête prompte, le coeur excellent, des fautes quelquefois qu'on excuse, des défauts qui amusent. Comment Rosambeau avait-il connu le prince Florestan, ou - mieux, comment le prince avait-il pu lui témoigner quelque affection ? La clé de cette énigme nous fut donnée par le docteur Poumiès de la Siboutie, qui fut pendant quarante ans l'ami du prince et qui recueillit cet aveu à son lit de mort : "On a fait sur mon compte courir des bruits ridicules, lui dit-il ; la vérité c'est que j'ai appartenu quatre ans au théâtre. En cherchant bien on retrouverait encore le nom de Florestan sur des programmes. Je jouais des rôles d'amoureux et j'étais très applaudi. Ma voix était douce et agréable et j'avais par dessus tout une tenue parfaite... De ces premières années, il m'est resté une sorte de passion pour tout ce qui tient au théâtre. J'en aurais eu un chez moi si je n'avais rencontré dans ma famille une opposition insurmontable. J'ai été lié avec les acteurs les plus haut placés. J'ai vécu dans leur intimité et jamais je n'ai trouvé des hommes plus aimables et de meilleure compagnie." Tout ceci demande une explication : la République française de 1792 avait dépossédé la dynastie des Grimaldi de la Principauté de Monaco, et Honoré IV, prince régnant, s'était réfugié à Paris, dépourvu de toutes ressources. Son second fils, Florestan, âgé alors de six ans, l'y avait suivi et y fut élevé. Devenu adolescent, grand et fort pour son âge, il avait couru les théâtres du Boulevard du Temple et, pour y pénétrer, n'avait rien trouvé de mieux que de s'y présenter comme figurant, humble fonction qu'il ne reniait pas par la suite. Puis on avait remarqué sa bonne tenue, sa distinction native ; on lui confia les rôles de jeune amoureux au théâtre de la Cité (situé en face du Palais de Justice), au théâtre du Marais (rue Culture Sainte Catherine), aujourd'hui rue de Sévigné. Le 15 août 1804 (il n'avait donc que dix neuf ans), il remplit le rôle du Roi de Prusse dans une pièce intitulée "Une Journée de Frédéric II". Il avait passé également par l'Ambigu. Que l'on ne s'étonne donc plus s'il avait connu Rosambeau - également de souche noble - et dont le père avait été ruiné par la Révolution. Tour à tour tambour à l'armée d'Italie, professeur d'escrime... et de mathématiques, perruquier à Londres, chanteur à Toulouse, mauvais cuisinier à l'ambassade de France à Constantinople, Florestan débuta à la Comédie Française, acteur partout et partout supportable, Rosambeau était devenu acteur légendaire, se taillant des jabots et des manchettes en papier, se cirant les jambes à Metz pour remplacer des bas noirs absents, empruntant son uniforme à un gendarme à Lille pendant la représentation et oubliant de le lui rendre à la sortie. Brave homme chargé de famille, toujours obligeant et prêt à partager son pain avec plus malheureux que lui. L'Empire fit une pension aux princes de Monaco, et la Restauration leur rendit leur Principauté. Honoré IV, père de Florestan, eut pour successeur son fils aîné, Honoré V, lequel céda la place à son tour à son frère cadet, Florestan 1er, qui n'avait pas oublié son vieux camarade Rosambeau. Pourtant, cette confession faite au bon docteur Poumiès de la Sicotie qui nous l'a transmise, avait été accompagnée d'un autre aveu : "J'ai beaucoup écrit, lui avait dit le Prince, mais je n'ai rien oublié ; j'ai d'abord des Mémoires, des comédies, des vers, des relations de voyages." Qui publiera les Mémoires de Florestan 1er ?
Henri LYONNET
Aidé par M. Labande, membre de l'Institut et archiviste de Son Altesse Sérénissime le prince Louis de Monaco, quelques mois plus tard, j'ai fait une comédie dont les couplets sont de mon bien cher ami Albert Willemetz, puisqu'il est le maître des "lyrics" et puisqu'il m'avait présenté M. W. Richard Heymann, le compositeur déjà célèbre chez nous du "Congrès s'amuse" et des "Gars de la marine". Mais qu'aujourd'hui l'on comprenne pourquoi je dédie Florestan 1er, Prince de Monaco, à M. Sam Barlow.
Fantaisie (2 faces) / Orchestre des Variétés(chant) ODEON 250589 (1934) - Coll. Jacques Gana
acc. orch. dir. Raoul Labis
Amusez vous / Margot / C'est si charmant / Je l'aime je l'adore / Ah si j'avais été ténor
Je l'aime, je l'adore / DEBERT (Charles)(chant) CRISTAL 5736 (1934)
Je l'aime, je l'adore / PRÉJEAN (Albert)(chant) COLUMBIA DF 1427 (1934)